« Entre le chagrin et le néant, je choisis le chagrin. » William Faulkner
J'étais sur un processus de création de mon film. Il y a eu un moment où ça s'est compliqué, où il y a eu beaucoup beaucoup de conflits, à cause de ce projet qui était très intime.
Et en fait, je me retrouve seule.
Tu vois, il y a un truc qui monte, un truc de rage. Je tombe dans ma baignoire. J'avais plus de force. J'ai pu me relever pour aller chercher un téléphone. J'ai pu appeler mes frères qui sont venus tout de suite. J'étais entourée de vachement d'amour. Et ils m'emmènent à l'hôpital, pour faire un examen. Il n'y a rien, pas de fracture... Je rentre chez l'un de mes frères. Je pars dans un sanglot... En fait, je pleure pendant une semaine, parce qu'il y a eu une série d'événements, qui ont été mis sous le tapis pendant 5, 10, 15, 20 ans, qui à un moment émergent.
C'était ce sentiment de solitude. Cette chute m'a reconnectée à la rage et au chagrin de l'enfant. Et ça a été, évidemment très douloureux, mais en même temps totalement libérateur. C'est-à-dire qu'une fois que j'avais compris toutes ces couches de sentiments, c'était plus du tout dans la pensée, c'était plus du tout un truc de thérapie. C'était vraiment dans le corps, qui se met à trembler, qui se met à pleurer, qui se met à se vider.
Quand ça arrive, c'est que t'es prêt. Une fois que tu as compris que t'en meurs pas, les cycles deviennent de plus en plus rapides. T'as plus besoin de résister.
Maintenant, quand ça m'arrive, ça fait super mal, je chiale etc. Mais je le fais les yeux ouverts. Il m'a fallu beaucoup de temps pour enlever le masque de la joie, enlever le masque de la colère, enlever le masque de la déception, enlever le masque du mépris, pour aller chercher ma tristesse.
Peut-être que j'ai eu des parents qui n’ont pas été ce que j'aurais aimé qu'ils soient. On ne mesure pas à quel point on est aimé, et à quel point il y a du monde autour de nous. Et ça, quand tu le vois, ça change toute ta vie. C'est plus cette impression que j'avais avant, de retomber dans le puits. Maintenant que je me suis réconciliée avec cette enfant, on ne peut pas dire que je sois une adulte triste. »
Mai Hua
Crédit photo : Joshua Rawson-Harris
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