« L’humour est le plus court chemin d’un homme à un autre. » Georges Wolinski
Il y a fort à penser que si vous mettez votre enfant devant le spectacle de la talentueuse Blanche Gardin, vous ne récolterez aucun éclat de rire. Non pas parce qu’elle n’est pas drôle, mais simplement parce que les réactions d’un bébé ou d’un jeune enfant face à l’humour sont imprévisibles et très différentes de celles des adultes. Pourtant bébés et jeunes enfants ne sont pas dénués d’humour !
Les premiers rires chez un bébé apparaissent en général vers l’âge de 4 mois. Mais cela reste très variable : “Les premiers signes d’humour apparaissent à la suite de stimulations sensorielles puis évoluent en même temps que la maturation du cerveau et donc de l’intelligence du bébé”, explique Héloïse Junier, psychologue. Le rire est donc un excellent prisme pour observer le développement cognitif de l’enfant.
Du sourire réflexe aux premiers éclats de rire
Contrairement au sourire, souvent présenté comme “réflexe" dans certains pans de la littérature scientifique, le rire du bébé ne serait pas un automatisme. Mais alors, qu’est-ce qui fait rire le tout-petit ? “Ce qui fait le plus rire un bébé en début de vie, c’est le stimulus social du visage humain”, précise notre spécialiste. Le visage du parent est un véritable déclencheur qui permet au bébé de sourire dans un premier temps, et de rire dans un second temps.
Et l’humour alors ? Car on le voit bien, chez les adultes, nous ne sommes pas tous logés à la même enseigne : “Durant les premiers mois de la vie de l’enfant, on ne sait rien de l’humour. Il faut faire attention, car on est toujours tenté de comparer l’enfant à l’adulte et de surinterpréter ses comportements comme s’il était un adulte miniature", précise la psychologue. Ce qui est certain, c’est que : plus l’enfant se développe, plus son humour devient clair. De semaines en semaines et de mois en mois, l’enfant va vite comprendre les relations de cause à effet entre son comportement et celui de l’autre : “Pour autant, sa véritable capacité à se décentrer de lui-même arrivera vers 4-5 ans”, insiste Héloïse.
L’humour des enfants dépend-t-il de l'humour des parents ?
Le saviez-vous ? Le sens de l’humour de l’enfant dépend, en grande partie, de l’humour de ses parents. Alors, parents, attention ! Grâce à vous, votre progéniture pourrait s’avérer être le nouveau Jamel Debbouze ou au contraire, un adulte qui n’est pas vraiment très drôle (rien de mal à ça, on en connaît tous). Notre psychologue insiste : “L’humour ? Ça s’apprend, ça s’entretient et ça se travaille”.
Mais plus important encore, l’humour est une force. Cette légèreté d’esprit s’avère être un très bon régulateur émotionnel : “Les enfants qui ont un sens de l’humour fin et réactif auront plus de chance de mieux faire face aux aléas du quotidien”, explique Héloïse. “D’ailleurs, on se rend compte aujourd’hui que l’un des principaux facteurs de réussite scolaire de l’enfant est sa capacité à gérer ses émotions et à s’intégrer à un groupe afin d’y créer des liens. Pour ce faire, l’humour est un très bon vecteur. C’est un facteur d’intégration qui renforce la confiance de l’enfant au sein du groupe, et donc son épanouissement au sein de la société”, précise la spécialiste.
Comment développer le sens de l’humour de son enfant ?
“Les enfants ont un humour propre à leur âge. Celui-ci ne peut pas se développer plus vite que la musique et devenir celui d’un adulte. Le développement cognitif de l’enfant prend du temps. Quand ce dernier aura 9-10 ans, là, on pourra constater une variabilité de style d’humour. Plus il grandira, plus il y aura des différences.”
Pour développer l’humour de l’enfant, plusieurs options existent
- Si un adulte est exposé à un phénomène de stress ou à une situation désagréable et qu’il tourne ce moment en dérision devant son enfant (un objet qui se casse), il participera alors au développement de l’humour du petit.
- Si l’adulte se met en scène (imiter un animal au milieu du salon), l’enfant apprend que la situation est drôle.
Car ce qui fait rire le jeune enfant, c’est l’incongruité et le décalage entre la situation et la réalité. Faire semblant de téléphoner avec une banane par exemple.
Plus l’enfant grandit, plus on peut comprendre son développement intellectuel. L’humour permet de voir l’état des connaissances du monde de l’enfant et c’est en cela qu’il est indispensable !
Conversation avec Héloïse Junier, psychologue spécialiste de la petite enfance, conférencière et auteure de nombreux ouvrages sur la psychologie du tout-petit.
